J’AI L’IMPRESSION QUE 2022 EST UN PORTAIL SPACIO-TEMPOREL VERS LES ANNÉES 80.
Une réminiscence de la guerre froide avec le conflit en Ukraine, MUGLER qui redeviens LA marque à suivre avec une rétrospective au musée des Arts Décoratifs, même le spectacle STARMANIA est programmé à la Seine Musicale pour fin 2022. Étant née dans les années 90, je ne peux pas vraiment dire que cette époque fait appel à des souvenirs ou me semble familière. Il s’agit plutôt de la génération de mes parents en réalité. Mais quelque chose dans l’actualité fait écho à cette génération X, désillusionnée, en fracture sociale et angoissée par la perspective du millénaire nouveau. L’aube de l’an 2000, aussi fascinant que terrifiant. Aujourd’hui, nous sommes dans le futur. Le futur qu’imaginais avec fantasmagorie Thierry Mugler, le futur que chantais Michel Berger, c’est maintenant.
“Y’A PLUS D’AVENIR SUR LA TERRE, QU’EST-CE QU’ON VA FAIRE ?“
Analyser les tendances 2022, c’est analyser STARMANIA. Pour ceux qui ne connaissent pas, STARMANIA est un opéra rock, à mi-chemin entre la comédie musicale et le concert, monté par Michel Berger en 1979. L’histoire décrit un monde futuriste, dans lequel évoluent des personnages tous désespérés à leur façon et qui rêvent d’une vie meilleure et de gloire en participant à une émission de télé-réalité : Starmania. Les thèmes de l’uniformisation culturelle («De New-York à Tokyo, tout est partout pareil.»), de massification des échanges, d’écologie sont très présents. Un des aspect les plus intéressants, c’est la description de cette génération qui oscille entre colère, à l’image de Johnny Rockfort, et désespoir comme le personnage de Marie-Jeanne la serveuse automate. Une génération abandonnée à la violence, sans perspective d’avenir dans un monde déshumanisé et robotisé à l’extrême.
“J’AI TOUT CASSÉ AVANT DE PARTIR, J’AI PAS DE PASSÉ J’AI PAS D’AVENIR.“
Sans tomber dans une sombre projection de notre siècle, entre l’épidémie du covid-19 et la guerre en Ukraine, il y a de quoi nourrir un imaginaire plus «dark» et une esthétique cyber-punk chez nombre de créateurs. À commencer par la mode, avec l’univers de Charles de Vilmorin, très jeune directeur artistique de la maison Rochas. Ses créations sont peuplées de peintures de femmes-aliens, inquiétantes quoique très colorées et aux volumes et coupes très 80. Pour sa collection automne-hiver 2021-2022, les silhouettes sont devenues totalement noires, ornées de griffes, de voiles, de traines et de cornes dorsales impressionnantes.
Même esprit pour Casey Cadwallader, le directeur artistique de Mugler qui habille maintenant Bella Hadid, Dua lipa, Rihanna, Miley Cyrus ou Kim Kardashian pour n’en citer que quelque unes. Ses silhouettes lassées, corsetées, aux épaules mises en avant sont un hommage à l’héritage de Thierry Mugler et à son idée de la femme du futur : cyborg, puissante, inquiétante. En 2022, le monde n’est plus tendu vers la recherche de performance, l’optimisme, la progression mais vers la destruction. Le néo-punk, c’est l’esthétique de la destruction, du chaos nécessaire à l’avènement d’une ère nouvelle. On brûle tout, on fait tout péter, on atomise l’ancien monde, ivres de pouvoir, de puissance, et de noirceur si longtemps contenus.
Credit images
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Textes
Agathe Ravier
© Agathe Ravier, 2022